Interview

Interview : le Consul Lasso Kourouma dit tout sur les guinéens vivant en Angola

En séjour récemment à Conakry, notre reporter a rencontré le Consul de la République de Guinée en Angola, Lasso Kourouma, qui lui a accordé un entretien pour parler de plusieurs sujets liés à la vie des guinéens en Angola.

A l’occasion, le consul a révélé : «Pour le cas de l’Angola, la vérité est que ce sont nos compatriotes eux-mêmes qui s’entretuent. Il y a la haute trahison dans l’exercice de leur commerce».

Nous vous proposons le contenu de cet entretien :

 

Les nombreux guinéens vivant sur le sol angolais sont confrontés à d’énormes difficultés liées à leur acceptation par les autorités de ce pays. Votre lecture de la chose !

 

Nous sommes confrontés à des difficultés énormes qui sont d’ordre financier. C’est-à-dire, les guinéens sont partis en Angola à la recherche d’un bonheur, sachant que ce pays regorge d’énormes richesses. Mais le plus fondamental est que les 90% des guinéens vont en Angola clandestinement. Je dirai que le flux migratoire clandestin de nos compatriotes est trop élevé et les tranches d’âge sont entre 15 et 21ans. Je dirai que c’est une perte pour la Guinée au niveau de ses ressources humaines, parce que la jeunesse est une partie essentielle de la vie d’une nation, et quand cette jeunesse sort, c’est toute l’autorité qui est concernée.

Donc, l’Etat doit prendre ses précautions, ainsi que les familles et la Société civile qui doivent jouer un rôle important. La sensibilisation doit se faire à tous les niveaux.

Ils abandonnent leurs métiers, leurs études pour aller vivre clandestinement ailleurs. Chacun court après l’argent qui devient pour lui, un petit Dieu.

 

Les tueries, les emprisonnements, les tortures seraient, entre autres, des maux dont souffrent vos compatriotes guinéens. Qu’en dites-vous ?

En Angola, il y a beaucoup de mimétismes dans les déclarations de nos compatriotes guinéens. Sachez que ce n’est pas les guinéens seulement qui vivent en Angola et donc, le problème est universel. Partout où il y a l’économie, c’est là où il y a les difficultés migratoires.

Mais pour le cas de l’Angola, la vérité est que ce sont nos compatriotes eux-mêmes qui s’entretuent. Il y a la haute trahison dans l’exercice de leur commerce. Quand il y a une affiliation entre deux personnes ou entre un groupe de personnes, et dès qu’il y a l’évolution dans leur commerce, les uns cherchent à éliminer les autres, selon les investigations de l’autorité angolaise. Nous-mêmes, nous sommes imprégnés et nous avons tous les éléments positifs. Nous avons même interpelé 07 ou 08 personnes. Parce qu’en 2012-2013 on a pris 18 guinéens aves des armes qui s’infiltraient dans les maisons de nos concitoyens et les tuaient.

De 2014 à 2016 là aussi, nous avons enregistré beaucoup de tueries. Mais quand nous portons plainte, il s’est avéré que c’est les guinéens qui s’entretuent. Nous avons pris 4 ou 5 personnes qui sont actuellement en cavale. Il y a un dernier élément qui a été révélé. Un certain Mamadou Damdako Diallo qui a failli tuer son propre cousin. Ils sont associés à la gestion de deux magasins. Comme son cousin a plus de chance que lui, donc il a tenté, à travers des bandits, d’éliminer son cousin.

Par rapport à ces cas de tueries, il faut savoir qu’il y a des tueries sur des réseaux sociaux, mais le fondamental n’est pas là. Généralement par rapport à la négation morale de certains de nos compatriotes, et par rapport à leur parti politique, on cherchait à salir l’image de l’Etat guinéen. Parce qu’ils savent qu’il y a une interconnexion, qu’il y a un fondamentalisme amical entre les Etats guinéens et angolais. Donc, il fallait salir à travers les réseaux sociaux. Ils prennent des images de Centrafrique et du Congo au moment où ces pays étaient en guerre, pour les coller sur internet, faisant croire que c’est des cas guinéens.

Donc avant de juger, il faut d’abord approcher les services migratoires se trouvant à l’Aéroport de Conakry-Gbessia, il y a aussi le Ministère des Affaires Etrangères et des Guinéens de l’Etranger. Ce sont des points focaux pour se renseigner.

Pour votre information, toutes les Ambassades sont tenues de faire leurs rapports trimestriels. Dans ces rapports, vous trouverez ce que nous faisons et les réalités fondamentales.

 

L’Ambassade de Guinée en Angola est aujourd’hui mal critiquée par les guinéens résidents dans ce pays. Quelle est votre réaction ?

En Guinée, il y a plus de politiciens que de citoyens, d’où la floraison des partis politiques qui fait des guinéens mesquins. C’est en Angola que vous allez trouver un guinéen qui a tout un respect divin face à l’autorité angolaise. Il pense que son autorité en Angola ne représente qu’Alpha Condé. C’est ça la connotation qui est dans la tête du guinéen. Combien de guinéens ont la notion de s’enregistrer dans leur Ambassade, une fois dans un pays étranger ? Peut-être tu ne trouveras que 2 ou 3 sur 100.

 

Qu’est-ce que vous avez fait pour leur sensibilisation ?

Nous, nous avons fait la diplomatie de porte à porte quand Djigui est venu. Ce n’est pas pour jeter la fleur à mon ambassadeur parce que le premier qui était là-bas, n’était plus maintenant à la dimension de gérer, et vu son âge. Mais quand Djigui est venu, sa première démarche d’abord c’était de délocaliser l’Ambassade d’un quartier bidon pour la Forêt des Ambassades à Miramar. Un quartier chic, où toutes les Ambassades européennes et américaines se trouvent.

Entre-temps, il a exigé qu’on aille vers nos populations. Donc, on a fait un programme dont les archives existent encore. Alors, on a fait le porte à porte. C’est-à-dire, d’un quartier à un autre où les guinéens nous attendaient. On a sensibilisé et mis une équipe sur place pour l’enregistrement des guinéens en vue d’avoir un fichier adéquat. Donc cela a été fait, mais entre-temps, il y a eu des communications dans les oreilles soi-disant que «c’est un enregistrement à connotation politique».

Mais malgré tout, nous avons fait notre travail. On a fait près de deux mois d’opération où on a eu plus de vingt mille guinéens enregistrés. Mais après, on a constaté que certains éléments de la communauté avaient commencé à faire un autre enregistrement sans passer par l’Ambassade. Quand on a appris çà, on a écrit au représentant des différentes communautés, mais ils ont été rigides.

Donc, on était obligé de passer par la Police angolaise pour stopper cette opération illégale. On comprend, c’est l’ignorance qui fait ça. Mais nous ne cessons de sensibiliser partout, dans les mosquées et bien dans d’autres lieux de regroupement.

 

Pourquoi les guinéens aiment partir clandestinement en Angola ?

Bon ! Je vais vous dire qu’il y a l’ignorance d’abord, ensuite l’exploitation éhontée. Parce que le guinéen préfère l’intermédiaire que la voie officielle. Arrivés dans les pays étrangers, deux mois après, ils sont illégaux, parce qu’ils ont seulement quelques jours de visa d’entrée.

Sachez que les pays ne sont pas les mêmes. L’Angola était confronté à d’énormes problèmes avec de longues années de guerre armées (27 ans). Ils sont en train de faire leur Etat, et c’est un pays qui est tellement organisé qu’il faut d’abord le visa. Il y a des guinéens qui laissent leur Ambassade et passe par des intermédiaires qui leur font des faux visas en complicité avec certains services d’immigration angolais. Les gens préfèrent payer huit (8) mille dollars à des intermédiaires.

L’Etat est organisé, le pouvoir est accompagné par une autorité forte, qu’on le veuille ou pas. Alors, une Ambassade c’est le point focal des citoyens. Mais, ils ne viennent pas sauf quand ils ont besoin des cartes consulaires, c’est-à-dire l’établissement de certains documents ou soit, quand ils veulent voyager pour leur laisser passer.

 

Comment se porte la diplomatie Guinéo-angolaise ?

Celle-ci se porte bien, surtout que nous avons des amitiés séculaires. Depuis leur indépendance, la Guinée et l’Angola ont la main dans la main. Jusqu’à présent dans les rencontres entre les autorités, ça marche. Nous savons ce que l’Angola a fait pour l’Etat guinéen et nous, nous le savons. L’Angola sert beaucoup pour la Guinée et vice-versa.

 

Merci de nous avoir accordé cet entretien

C’est moi qui vous remercie !

Propos recueillis par ScoopGuinée

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